La Sauvagine

 

Sophie Brocas

 

En librairie dès le 3 mars 2021

La vie est ironique. À quoi sert de gagner au loto quand on vous apprend que vous êtes atteinte d’une leucémie ? Née dans une petite ville industrielle que la crise a dévastée mais qu’une bande de citadins chics s’est mis en tête de coloniser, Mado voit son univers s’effondrer. Une greffe osseuse peut la sauver. Sauf que le seul donneur compatible est son frère aîné, Léon, à qui elle ne parle plus depuis longtemps. Avec intelligence, courage et détermination, Mado démontre magnifiquement que la vie est un combat que certains savent ne pas perdre.

Sophie Brocas

Après avoir disséqué la psychologie féminine dans un premier roman très remarqué, Le Cercle des femmes (2014), Sophie Brocas a publié Camping-car (2016) et Le Baiser (2019), en cours d’adaptation pour le cinéma. La Sauvagine est son quatrième roman, sorte de conte moderne qui explore les relations entre frère et soeur.

Photo © Maxime Reychman

Extrait

Dans le bureau du professeur, l’annonce de la maladie a fait un gros trou dans ma tête. Ce mot terrible a déchiré mon âme : leucémie.
LEUCÉMIE. C’est un mot cru, tout nu, obscène, un mot terroriste, tu ne trouves pas ? Il t’oblige à voir. Il te force à comprendre. Il sème la terreur.
Ce n’est pas comme néoplasie, oncologie, ou d’autres mots compliqués qui ne se laissent pas aisément attraper par le commun des gens. Non, leucémie, c’est la mort qui s’invite avec sa morgue dans ta maison.
Madame Astrid était là. Mais, cette première fois, je ne l’ai pas vraiment remarquée. Comme je n’ai rien compris aux mots du professeur : pronostic intermédiaire, 30 % de blastes circulants, chimio, greffe, secteur stérile.
J’en parle tranquillement à présent. Tout cela est derrière moi. Mais, le jour de l’annonce, j’étais anéantie, paralysée, foudroyée. Le temps s’était suspendu, ma vie venait de se figer. Je me rappelle seulement que j’avais le coeur aux tempes et qu’il frappait fort. Pour le reste, incapable de penser. Juste ce trou dans ma tête et cette frayeur épaisse, massive, étouffante qui m’a soudain ensevelie. Comme dans des sables mouvants : tu bouges, tu t’enfonces ; tu ne bouges pas, tu t’enfonces aussi. J’étais tétanisée.
La bonne santé ? C’était hier, je n’en avais pas mesuré le prix, et c’était fini.
L’insouciance ? Elle reviendrait, ou pas.
L’impression d’être éternelle ? Quelle connerie ! Moi qui ne pensais jamais à ma mort, la voilà qui me fichait son énorme poing dans la gueule.
Et puis ça me semblait tellement injuste. Je n’avais jamais été une mauvaise fille. Je n’avais jamais fait trop d’excès.
C’est idiot, mais j’avais absolument besoin d’une explication, d’une raison à ce malheur. C’était peut-être le travail.
Oui, je me suis dit que j’avais trop trimé. Je me suis dit que ça m’avait comme déréglée. Quand on est la fille d’un ouvrier de la Sauvagine, le travail ça vous connaît.
La Sauvagine, mon quartier depuis toujours.

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